Ianera & You
Nobody got my back.
Les humains avaient des rituels pour tout. Comme chaque procédure des algorithmes qui me constituent, ils avaient des routines indispensables au déroulement de leur journée mais aussi à l'assouvissement de leurs besoins primaires. Des machines biologiques qui restaient, finalement, des machines.
Les modèles des Hautmonts étaient bien différents de ceux que l'on pouvait trouver en bas. Un tel décalage était on ne peut plus intriguant. Comment ? Pourquoi ? Des questions qui avaient besoin de réponses car la logique semblait absente de la formation d'un tel fossé. Je comprenais les e jeux auxquels se prêtaient les humains mais tout ceci ressemblait plus à un sabordage qu'à un moyen de survivre... Paradoxalement, là était leur but : persister.
La race humaine se précipitait dans son déclin. L'immortalité par l'import de leur conscience dans une puce ? Les humains ré-enveloppés n'étaient plus que des enchaînements de 1 et de 0. Ceux qui croyaient au concept d'âme devaient y voir même une déshumanisation intégrale : ils ne sont plus eux-mêmes. Des ersatz, des copies, des illusions. Ils étaient nous mais avec des corps faits de chair. Qu'est-ce qui empêchait un humain de choisir pour enveloppe un robot et inversement ? Qu'est-ce qui pouvait empêcher qu'un robot soit intégré à un corps humain ? Je soupçonnais mon propriétaire de fouiller de ce côté.
Me faisant aux rituels de ces pseudo-humains, neo-humains ? Homo-machina. Je ressentis le besoin d'aller souhaiter une bonne nuit à Allynna. Mon maître m'avait demandé de veiller sur elle, de m'assurer qu'elle soit en sécurité. Bien qu'il y ait des gardes, des personnes que l'on peut payer pour protéger quelqu'un, il tenait à ce que la surveillance soit plus naturelle, qu'il y ait possibilité d'une affection. Un moyen de ne pas imposer un chaperon à sa nouvelle sœur tout en ayant l'assurance qu'elle ne sera jamais seule en cas de besoin.
Je jouais alors ce rôle. Non pas celui de la mère mais de la sœur. Cela ne plaisait pas à grand monde, d'autant qu'Allynna était encore le sujet de bien des conversations dans les hauteurs. Mais moi, j'appréciais cette femme. Un côté créatif et imaginatif propre aux humains. Un talent bien trop souvent sous-estimé et pourtant ô combien précieux...
C'est avec une certaine détermination que je m'engageai dans le couloir menant aux appartements d'Allynna, sans m'attendre à tomber nez à nez sur la jeune femme. Un détecteur de chaleur me permis de ne pas lui rentrer dedans au détour du corridor. "Allynna ! Où vas-tu ainsi vêtue ? Tes appartements sont de l'autre côté", lui indiquai-je en pointant de mon doigt la direction opposée dans laquelle elle se dirigeait. Ce n'était pas un reproche ni une inquiétude, une réelle et simple question. Son comportement était intriguant. Même si ce n'était qu'une direction et un accoutrement.
